« A penny for your thoughts »
Campagne de sensibilisation à l’exploitation sexuelle
En Europe, l’exploitation sexuelle est en expansion, les victimes sont difficilement identifiées, les acteurs de lutte contre l’exploitation sur le terrain trop peu nombreux et les législations européennes floues et/ou contradictoires d’un pays à l’autre. Le résultat est que les trafiquants passent entre les mailles du filet et utilisent des moyens de contraindre leurs victimes qui sont inconnus du grand public et donc des potentiels utilisateurs de ces services.
Une affiche interpellante est apparue pendant un mois sur les murs de 6 villes européennes, dont Bruxelles. Une silhouette provocante, un prénom et un numéro de téléphone en sont les seuls éléments. Derrière le numéro belge, Tatiana, victime d’exploitation sexuelle, raconte son histoire et invite chacun à laisser un commentaire, «a thought». Cette campagne a été déclinée conjointement dans 6 villes européennes : Bruxelles, Paris, Bucarest, Sofia, Dublin et Lisbonne.
À l’origine de cette curieuse campagne d’information sur l’exploitation sexuelle, nous trouvons Marian van der Zwaan, une artiste néerlandaise engagée dans la lutte contre les discriminations faites à l’encontre des femmes et des immigrés. Par un travail de recherche et d’interviews de victimes et d’acteurs de terrain, Marian van der Zwaan expose les problèmes sociaux de notre époque. Marian van der Zwaan expose les problèmes sociaux de notre époque. Son travail a notamment reçu le soutien d’Amnesty International, des Nations Unies ainsi que de différents gouvernements.
Nous pensons qu’il est indispensable de rappeler au public, qu’il soit client de sexe tarifé ou non, que derrière l’apparent consentement des prostituées, se cache souvent un parcours d’esclave sexuel. En effet, il devient de plus en plus compliqué de déceler les signes de la traite des êtres humains chez les travailleuses du sexe, en particulier pour le client s’il n’est pas informé de l’existence de cette pratique inadmissible.
L’objectif de la campagne “TATIANA / A penny for your thoughts” était d’informer et de sensibiliser le grand public à la réalité vécue bien souvent par les personnes prostituées dont un très grand nombre sont victimes de la traite des êtres humains. Il s’agissait en parallèle de faire évoluer les mentalités sur le rôle du client de la prostitution, sans pour autant viser à le poursuivre comme c’est déjà le cas en Suède ou en France, mais le responsabiliser par rapport à son rôle actif dans un système d’exploitation de la personne humaine.
La Conférence de clôture de la campagne avait également pour objectif de sensibiliser le monde politique à l’amélioration ou l’adaptation de la législation existante en matière de traite des êtres humains et d’exploitation sexuelle.
La date choisie pour organiser la conférence de clôture de la campagne était symbolique : en effet le 18 octobre est la Journée Européenne de Lutte contre la traite des Êtres Humains.
L’OBJECTIF DE CETTE CAMPAGNE :
Afin de sensibiliser un public le plus large possible, et compte tenu des moyens financiers disponibles, nous avons opté pour une campagne diffusée en trois étapes :
- 2 très grandes affiches (3m x 2m) exposées dans un endroit des endroits les plus fréquenté de la capitale -Place Flagey-,
- 39 affiches format abribus dans le réseau Nord de la STIB
- Avec la distribution de 70.000 cartes postales Boomerang dans le réseau Guidooh à Bruxelles et sur tout le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’impact territorial de la campagne a été le plus large possible.
- Une annonce sur le site 2emeMain.be qui propose des services de « massage »
- La création d’un profil Tinder
Si l’affichage Place Flagey a attiré l’attention de nombreuses personnes de tous âges fréquentant ce lieu multiculturel, l’impact de la campagne a été indubitablement démultiplié par la présence du visuel dans les stations de métro du Réseau Nord de la STIB. Cela a permis d’atteindre un public plus facilement exclu des modes de communication et des espaces publics de débats et de participation citoyenne.
La campagne s’est achevée par une Conférence internationale qui s’est tenue le 18 octobre 2017 à l’Amazone et qui a rassemblé une petite centaine de personnes. Introduite par Viviane Teitelbaum, Présidente du CFFB, et modérée par Manuel Abramowicz, professeur à la Haute Ecole Libre de Bruxelles.
Marian van der Zwaan a présenté l’évaluation de la campagne sous forme de vidéo, commentée ensuite par plusieurs participants au projet : Sylvie Bianchi pour la Fondation Samilia, porteur du projet, et les représentants de l’associations Ruhama de Dublin et de la Fondation Scelles à Paris.
Ensuite, le film documentaire « Impasse » a été présenté par sa réalisatrice Elise Schubs.
IMPASSE propose un regard sans fantasme ni concession sur la réalité de ces femmes qui louent leur corps pour joindre les deux bouts ou qui sont prises dans des réseaux de prostitution forcée. Ce film est le fruit d’une année d’immersion dans le périmètre de la prostitution du quartier de Sévelin à Lausanne. Elise Shubs prend le parti de considérer ce quartier comme un véritable théâtre dans laquelle se joue la vie d’êtres humains. A l’écart des clichés et des préjugés, des témoignages au plus proche de l’intime, racontent librement l’envers du décor : les impacts de la mise à disposition de son corps, la survie, le secret, la destruction et l’espoir. Un regard humain sur le froid visage de la prostitution.
S’en est suivi un intéressant débat avec l’assistance. Parmi le public plusieurs personnes prostituées, dont une victime de traite des êtres humains, ont témoigné directement, ce qui a contribué à faire évoluer les mentalités par rapport à l’idée préconçue que le public présent (majoritairement féminin) se faisait des personnes prostituées d’origine étrangère.
DEVELOPER UNE PRISE DE CONSCIENCE / ATTITUDE CRITIQUE
Une silhouette provocante, un prénom et un numéro de téléphone étaient les seules indications figurant sur l’affiche. Au bout du fil, un message vocal. Tatiana, victime d’exploitation sexuelle, raconte son histoire, et invite chacun à laisser un commentaire, « a thought ».
L’objectif de cette campagne est de faire prendre conscience à chacun, client de sexe tarifé ou non, que derrière l’apparent consentement des personnes prostituées, se cache bien souvent un parcours d’esclave sexuel.
De manière à interpeller efficacement le grand public, l’effet de surprise devait être total, d’où le caractère intrigant de l’affiche : provocante sans être pornographique.
Parce que notre exigence d’authenticité et de cohérence était inhérent au projet, la voix enregistrée était celle d’une ancienne victime de la traite des êtres humains, et le récit enregistré, celui de son propre parcours.
Nous tenions beaucoup à susciter une attitude critique dans le chef du grand public, d’où la possibilité de laisser un message enregistré dans la boîte vocale.
BILAN QUANTITATIF
- 1685 Appels : Le public a écouté le message jusqu’au bout
1071 Appels manqués : Le public a écouté le message, mais pas jusqu’à la fin
191 messages vocaux
180 SMS
En tout, 2756 personnes ont composé le numéro
- La campagne a été relayée par 15 médias nationaux.
Les publications de notre page concernant la campagne comptabilisent 6134 vues sur Facebook.
70.000 cartes Guidooh ont été distribuées à Bruxelles et en Wallonie.
Les résultats de la campagne ont été rassemblés sur un site Internet penny.mzwaan.pt qui a été vue 484 fois, ainsi que sur une vidéo, diffusée à l’occasion de la matinée thématique.
SENSIBILISATION DES MEDIAS
La campagne a été fort remarquée par les médias qui l’ont abondamment relayée. Lors de chaque interview nous avons particulièrement veillé à ce que le message transmis évite le voyeurisme ou la polémique prostitution libre/prostitution forcée, pour se concentrer sur la traite des êtres humains, présentée comme enjeu de société et cela pour faire évoluer les mentalités et de là, avoir un impact sur une meilleure application des lois et règlementations en vigueur.
Nous avons également veillé à établir une stratégie de communication qui mobilise des moyens médiatiques diversifiés en privilégiant l’usage des nouvelles technologies de communication :
- Affichage public
- Site internet
- Message vocal accessible via téléphone
- Distribution de cartes Guidooh
- Réseaux sociaux
- Plateforme sociale en ligne Tinder
- Vidéo postée sur Youtube
Plus d’informations sur les résultats ICI
COLLABORATIONS / PARTENARIATS
- 6 Villes européennes: la collaboration entre les différentes associations a été fructueuse. Chaque partenaire a reçu le matériel adapté pour l’affichage : prénom, silhouette et numéro de téléphone différents pour chaque ville, numéro de téléphone. Les modalités d’affichage ont varié en fonction des moyens financiers et humains propres à chaque association partenaire. La Fondation Samilia étant la seule à bénéficier d’une subvention publique, l’ampleur de l’affichage réalisé à Bruxelles n’était pas comparable à celui réalisé dans les autres villes ; à Bucarest et Sofia en particulier.
D’où une très grande variation dans l’impact de la campagne en fonction des villes où elle a été mise en place.
- STIB / JC DECAUX: le partenariat initié avec la STIB et JC DECAUX a été déterminant dans l’impact de la campagne en Fédération Wallonie Bruxelles, et à Bruxelles en particulier. L’affichage massif de 39 silhouettes « Tatiana » dans les stations du secteur Nord du métro bruxellois a permis à la campagne d’être vue non seulement par des milliers d’usagers et mais également d’être relayée par les principaux media de la Fédération Wallonie-Bruxelles (RTL, RTBF, La Libre, BX1, La Capitale, Paris-Match, Metro…)
- Commune d’Ixelles / ULB: nous cherchions un endroit très fréquenté par un public varié et multiculturel et où il serait possible d’installer la grande affiche « Tatiana ». La Place Flagey s’est rapidement imposée. Nous avons donc initié un partenariat avec la Commune d’Ixelles (propriétaire du bâtiment de la Cambre situé Place Flagey) et avec l’ULB (locataire du bâtiment).
- CFFB: le Conseil des Femmes Francophones de Belgique s’est associé à l’organisation de la Conférence de clôture de la campagne en mettant la grande salle de l’Amazone à disposition et en diffusant les invitations à son réseau de membres. En outre, la présidente du CFFB a prononcé l’allocution d’ouverture de la Conférence. Plusieurs des associations membres du CFFB ont par la suite invité Samilia à venir présenter la campagne lors d’événements de sensibilisation aux enjeux démocratiques : SOLIDARIS, Le Monde selon les Femmes.
- BPS: l’Observatoire Bruxellois pour la Prévention et la Sécurité a participé à l’organisation de la Conférence en présentant la mission de Bruxelles Prévention et Sécurité ainsi qu’une synthèse du Plan Général de Sécurité et de Prévention en matière de Traite des Êtres Humains. C’est Madame Aline Distexhe, analyste, qui a effectué cette présentation. La collaboration avec Bruxelles Prévention et Sécurité est importante dans le but d’améliorer l’application des réglementations existantes en matière de lutte contre la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle.